Auteur, réalisateur, né à Cayenne en Guyane française, Pélagie Serge Poyotte débute en réalisant des courts-métrages amateurs en Super 8 et Hi-8 à l’adolescence. Après avoir travaillé dans divers médias, il étudie à l’ESEC (École Supérieure d’Études Cinématographiques) de 1996 à 1998 à Paris. En 2020, il sort en salles son premier long-métrage, Le lien qui nous unit et reçoit le prix spécial du jury au FEMI 2021.
Depuis de nombreuses années Serge Poyotte travaille main dans la main avec le Pôle Image Maroni pour intervenir auprès des jeunes pour leur transmettre sa passion et son métier. Peut-être les souvenirs d’adolescence ne sont pas si loin…
PIM : Serge Poyotte, vous êtes réalisateur et à ce titre, entre autres, vous intervenez depuis de nombreuses années dans le cadre d’ateliers scolaires ou périscolaires dans les établissements de Saint-Laurent du Maroni et alentours. Qu’est-ce qui vous motive dans ces interventions ? Et quel est votre lien à la Guyane ?
SG : Je me considère avant tout comme un réalisateur guyanais. Toute ma culture, l’esprit créole qui m’anime, sont enracinés à cette terre qui m’a vu naître. Aussi est-il important à mes yeux de partager mon savoir et mes compétences avec lesjeunes de Guyane. J’aurais pu enseigner dans des écoles de cinéma de l’Hexagone, puisque j’y ai reçu des propositions intéressantes. Ça ne m’intéressait pas car je trouve que c’est un challenge bien plus excitant d’enseigner aux jeunes guyanais. Je pense qu’il est important qu’ils sachent qu’un enfant du pays peut les aider à faire des films, que c’est possible aussi pour eux.
PIM : Qu’est-ce qui vous rapproche du Pôle image Maroni et de ses actions d’éducation aux images ?
SG : Vanina, Didier et Cédric* ! C’est grâce à Véronique Loit-Tournier** que je les ai connus. Donc il est évident que ce sont nos affinités électives qui me rapprochent de leurs actions et cimentent, à mesure que les années passent, ma collaboration avec eux.
PIM : En 2020, vous avez tourné une série fiction avec 5 établissements de ST-Laurent (Asani), qui a remporté un vif succès. Fort de ce succès, vous êtes actuellement, en train de tourner une nouvelle série « inter-établissements », pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste ? Et quel en est l’objectif ?
SG : La série Asani a permis à des jeunes collégiens d’être initiés aux différents métiers que l’on trouve sur un plateau de tournage. De fait, ils prennent conscience, accompagnés et soutenus par leurs professeurs, de la difficulté de fabriquer un film. Le but est de leur apprendre à façonner une histoire, développer des personnages, écrire un scénario avant de le tourner. Cette année, nous avons demandé à l’excellent réalisateur Julien Silloray de participer à l’aventure, pour la phase d’écriture uniquement – je m’occupe pour ma part de la phase de préparation et tournage. Avec la méthodologie de Julien, assisté d’Éléonore Magnin (chargée de mission Éducation à l’image), nous avons pu créer avec les cinq classes, cinq épisodes de genres différents avec des récits bouclés. C’est une anthologie, à l’inverse d’Asani qui était une série avec un personnage récurrent. On espère comme pour la précédente fournée susciter des vocations. Des jeunes qui sont proches de la déscolarisation se révèlent. Certains professeurs sont surpris par l’éclosion de différents talents : comédien.nes, technicien.nes, entre autres. Ils redécouvrent certains de leurs élèves. C’est une joie pour moi, c’est très émouvant d’assister à ces changements de points de vue et à ces métamorphoses.
PIM : Vous avez déjà une idée de quand nous pourrons découvrir ce nouveau travail ?
SG : Nous envisageons avec Vanina de restituer d’abord la série au mois de juin 2022 dans les collèges qui y ont participé. Ensuite, je pense que la série sera visible sur la chaîne du Pôle Image Maroni sur Youtube.
Propos recueillis par Marianne Doullay
*Vanina, Didier et Cédric : Vanina Lanfranchi, directrice du Pôle Image Maroni ; Didier Urbain : président de l’association Atelier Vidéo et Multimédia – Directeur de la société 5° Nord Productions ; Cédric Ross : responsable technique du Pôle Image Maroni
**Véronique Loit-Tournier : assistante de réalisation
Tournage Le lien qui nous unit, à la Charbonnière (2019), Saint-Laurent du Maroni. © MD